lundi 25 juin 2007

Arrêt CCLUX 1803

COUR CONSTITUTIONNELLE DU GRAND-DUCHE DE LUXEMBOURG

Arrêt no 18/03 du 21.11.2003

Numéro 00018 du registre

Audience publique du vendredi, vingt-et-un novembre deux mille trois.


Composition:

  • Monsieur Marc THILL, président,
  • Monsieur Georges KILL, vice-président,
  • Monsieur Jean JENTGEN, conseiller,
  • Madame Andrée WANTZ, conseillère,
  • Monsieur Roland SCHMIT, conseiller,
  • Madame Lily WAMPACH, greffier.

ENTRE:

Madame Eliane GELHAUSEN, infirmière libérale, demeurant à L-8399 WINDHOF, 7, route de Koerich,
demanderesse,
comparant par Maître Marc MODERT, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg,

ET

l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg, représenté par son Ministre d'Etat à L-1352 Luxembourg, 4, rue de la Congrégation,
défendeur,
comparant par Monsieur Guy SCHLEDER, délégué du Gouvernement, demeurant à Luxembourg,


LA COUR CONSTITUTIONNELLE:

Vu le jugement rendu le 22 avril 2003 par le tribunal administratif et transmis au greffe de la Cour Constitutionnelle le 25 avril 2003;

Ouï le conseiller Roland SCHMIT en son rapport et sur les conclusions de Eliane GELHAUSEN déposées le 28 mai 2003 et sur celles déposées le même jour par l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg;

Saisi par Eliane GELHAUSEN, infirmière libérale, d'une requête en annulation du règlement grand-ducal du 25 juillet 2002 portant sur l'exercice de la profession d'aide-soignant, le tribunal administratif, par jugement rendu le 22 avril 2003, a saisi la Cour Constitutionnelle de la question préjudicielle suivante:
«Les dispositions combinées des articles 1er et 7 de la loi modifiée du 26 mars 1992 sur l'exercice et la revalorisation de certaines professions de santé sont-elles conformes aux paragraphes (5) et (6) de l'article 11 et à l'article 36 de la Constitution combinés, sinon pris individuellement?»

Considérant que la question indique avec précision les dispositions législatives et constitutionnelles sur lesquelles elle porte;

Considérant que l'article 11 de la Constitution en ses passages pertinents, énonce au paragraphe (5) que «la loi organise (...) la protection de la santé (...)» et au paragraphe (6) que «la loi garantit (...) l'exercice de la profession libérale (...) sauf les restrictions à établir par le pouvoir législatif» et que l'article 36 dispose que «Le Grand-Duc fait les règlements et arrêtés nécessaires pour l'exécution des lois, sans jamais ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution»;

Considérant que la loi du 26 mars 1992 sur l'exercice et la revalorisation de certaines professions de santé, après avoir en son article premier énuméré les professions auxquelles elle s'applique - dont celle d'infirmière exercée par la requérante et celle d'aide-soignant visée par le règlement attaqué du 25 juillet 2002 - dispose en son article 7 sous l'intitulé «Statuts et attributions de ces professions» qu' «un règlement grand-ducal détermine le statut, les attributions et les règles d'exercice de ces professions»;

Considérant que le système des réserves de la loi énoncé par la Constitution empêche le pouvoir législatif de se dessaisir outre mesure de ses pouvoirs par la voie de l'habilitation; que ce pouvoir peut donc seul disposer valablement des matières érigées en réserve; qu'est toutefois satisfait à la réserve constitutionnelle si la loi se borne à tracer les grands principes: elle ne met par conséquent pas obstacle aux habilitations plus spécifiques;

Considérant que la loi du 26 mars 1992 sur l'exercice et la revalorisation de certaines professions de santé, après avoir désigné en son article 1er les professions de santé concernées, précise en son article 2 les critères généraux auxquels se trouve soumis l'autorisation d'accès à ces professions et fixe en ses articles 5, 6 et 8 à 15 les conditions communes liées à l'exercice de ces professions;

qu'ainsi le législateur, sans violer le principe constitutionnel du domaine réservé, a pu habiliter en son article 7 le pouvoir réglementaire à préciser le statut, les attributions et les règles d'exercice de chacune des différentes professions de santé visées par ladite loi.


Par ces motifs:

dit que les articles 1er et 7 de la loi du 26 mars 1992 sur l'exercice et la revalorisation de certaines professions de santé ne sont pas contraires aux articles 11(5) et (6) et 36 de la Constitution;

ordonne que dans les trente jours de son prononcé l'arrêt soit publié au Mémorial, Recueil de législation;

ordonne que l'expédition du présent arrêt soit envoyée par le greffe de la Cour Constitutionnelle au tribunal administratif dont émanait la saisine et qu'une copie certifiée conforme soit envoyée aux parties en cause devant cette juridiction.

Prononcé en audience publique par Nous, Marc THILL, président de la Cour Constitutionnelle, date qu'en tête.

Le président, Le greffier,
Marc Thill Lily Wampach